Le jeûne de la femme enceinte qui en subit un préjudice
Est-ce que la femme enceinte doit observer le jeûne du Ramadan et celui du jour d’Achoura ?
J’ai conseillé ma femme de ne pas jeûner le Ramadan et elle s’en est abstenue parce qu’elle était enceinte, affaiblie et anémique pendant sa grossesse. Elle a eu un avortement à la fin du Ramadan, à sa 12e semaine (3e mois). Qu’en est-il des jours qu’elle a manqués de jeûner ? Doit-elle les rattraper avant le Ramadan suivant ? Peut-elle observer le jeûne comme d’habitude quand elle est enceinte ? Etant donné qu’elle persiste à jeûner pendant sa grossesse, il serait pertinent, si possible, d’apporter un avis médical selon lequel le jeûne ne porte pas atteinte au foetus.
Louange à Allah
Cette question comporte trois éléments :
Dabord, le jugement de la non observance du jeûne par la femme enceinte.
Ensuite les conséquences d’un avortement survenu en Ramadan et enfin le jugement
du rattrapage post Ramadan.
S’agissant de la femme enceinte, il lui est permis de ne pas observer
le jeûne si elle a des craintes serieuses sur sa propre santé ou sur celle
de son enfant. Elle doit même s’en abstenir si elle craint d’y laisser sa
vie ou de subir un grave préjudice. Elle devra procéder à un rattrapage non
assorti d’expiation selon l’avis unanime des ulémas fondé sur les propos du
Très Haut : « Ne vous tuez pas », «Ne vous précipitez pas vers la
perdition ». Les jurisconsultes sont tous d’avis qu’aucune expiation
n’est prévue dans ce cas parce qu’elle est assimilable au malade qui craint
sur sa santé.
Si elle ne craint
que sur son foetus, certains ulémas disent aussi qu’il lui est permis de ne
pas oçbserver le jeûne. Dans ce cas, elle devra procéder au rattrapage et
à l’expiation. Celle-ci consiste à nourrir un pauvre pour chaque jour rattrapé.Cet
avis est fondé sur ce qui a été rapporté d’Ibn Abbas à propos de l’explication
de la parole du Très Haut : « Ceux qui le (jeûne) peuvent doivent procéder
à une expiation consistant à donner à manger à un pauvre », à savoir
qu’il (Ibn Abbas) a dit : « C’était une dispense accordée au vieillard
et à la femme âgée, capables tousles deux d’observer le jeûne ; elle leur
permettait de ne pas jeûner quitte à nourrir un pauvre à la place de tout
jour non jeûné. La femme enceinte et celle qui allaite pouvaient aussi, en
cas de crainte sur leur enfant, ajoute Abou Dawoud, ne pas observer le jeûne ».
(Cité par Abou Dawoud, 1947 et déclaré authentique par al-Albani
dans al-Irwa, 4/18,25). Voir l’Encyclopédie juridique, 16/272.
Ceci permet de voir clairement que si le jeûne porte atteinte sérieusement
à la femme ou à son foetus, elle doit s’en abstenir du jeûne. Mais le médecin
qui se prononce sur ce cas doit être un spécialiste sûr.
Ceci concerne la non observance du jeûne de Ramadan. S’agissant de
celui d’Ashowra, il n’est pas obligatoire selon un avis consensuel. Il est
plutôt recommandé. La femme ne doit pas s’engager dans un jeûne facultatif
sans la permission de son mari présent. Si celui-ci s’y oppose, elle doit
lui obéir surtout quand il s’agit de préserver l’intérêt du foetus.
Concernant l’avortement, si, comme vous le dites, elle a déjà fait
un avortement au troisième mois de sa grossesse, le sang qui s’écoule d’elle
n’est pas celui des couches mais celui des règles. Car elle n’a fait qu’expulser
un corps qui ne revêt pas une forme humaine claire. C’est pourquoi elle peut
prier et jeûner, même si le sang continuati de s’écouler. Cependant, elle
doit faire des ablutions pour chaque prière et rattraper les jours non jeûnés
et les prières non effectuées » Voir les Fatwa de la Commission
Permanente, 10/218.
S’agissant du rattrapage des jours perdus, toute personne ayant à
rattraper des jours du Ramadan doit le faire avant le Ramadan suivant. Il
peut retarder le rattrapage du jeûne jusqu’à l’arrivé de Chaabane. Si le Ramadan
suivant arrive sans qu’on ait procédé au rattrapage, en l’absence d’une excuse,
on a commis un péché.
On devra alors,
en plus du rattrapage, nourrir un pauvre pour chaque jour rattrapé.C’est l’avis
donné par un groupe des compagnons du Prophète (bénédiction et salut soient
sur lui). La nourriture à offrir consiste en un kilo et demi par jour prélevé
des denrées locales et offertes à un ou plusieurs pauvres. Si le retard du
jeûne de rattrapage est dû à une excuse comme la maladie ou le voyage, l’on
ne procède qu’un rattrapage et on n’a pas à donner de la nourriture, compte
tenu de la parole du Très Haut : « Celui qui est malade ou en voyage
(a à jeûner) un nombre de jours (de substitution). Allah est le garant de
l’assistance.
Fatwa de Cheikh Ibn Baz, 15/340